Le retour à l’école! On en entend des vertes et des pas mûres, des parents qui se réjouissent de se débarrasser enfin des enfants, à l’intimidation qui recommence dans les cours d’école et aux professeurs impatients en « burned-out » avant même la première heure en classe. Je me suis dit dans le cadre de la rentrée des classes, pourquoi ne pas témoigner de l’apport de ceux et celles qui ont guidé mon passage sur les bancs d’école et vous partager un texte que j’ai écrit en avril 2014 pour saluer le départ pour l’au-delà d’une vraie Prof.
Beaudet-Lemieux, Laberge-Bélanger, Palascio, Watine et les autres
Au secondaire, il est certain que ce sont davantage mes coaches de basket-ball qui m’ont le plus influencé. Je ne vivais que pour ce sport et passais tous mes temps libres dans les gymnases profitant de toutes les occasions pour dribler un peu et faire quelques paniers (merci Claire Laberge-Bélanger). C’est au CEGEP Limoilou que j’ai découvert qu’il y avait autre chose qu’un ballon comme source de réalisation : le théâtre, le Cinéma, l’improvisation, la vidéo, la radio : la passion qui m’habitait, la création qui m’animait s’éveillaient par un plongeon salutaire dans le monde des « Communications ». Mon parcours allait une fois de plus être influencé par un professeur (merci Serge Palascio). D’autres espèces de profs passionnés ont parfait cette évolution du côté universitaire (merci Thierry Watine). Mais, dès le départ, il y avait eu un lien de confiance important entre l’école et la vie familiale : une année marquante vécue dans mon quartier d’enfance, paroisse Notre-Dame-de-Pitié (merci Lise Beaudet-Lemieux).
Elle nous appelait ses grands
Le printemps dernier, une vraie disparaissait, voici le témoignage que j’ai écrit à la famille de Lise Beaudet-Lemieux. Ce témoignage en est un parmi bien d’autres, car malgré tout ce que l’on peut lire et entendre au sujet de la rentrée, des professeurs devront tenir le phare pour les mois qui suivent et les élèves grandiront à leurs côtés dans le plaisir et la difficulté de l’apprentissage scolaire : ils vivront eux aussi de moments marquants qui laisseront leurs traces :
«Allez mes grands, c’est le temps d’entrer, nous a-t-elle dit après avoir guidé notre montée à notre classe en double file indienne. Elle nous appelait ses grands parce qu’on était la classe de 6e, les plus vieux de l’École élémentaire de Notre-Dame-de Pitié. Mais moi, je sais qu’elle nous appelait consciemment ses GRANDS, car elle voulait que l’on soit grands, grands comme le monde d’adultes qui nous attendait devant : grands comme tous les autres jeunes issus des diverses écoles de la ville de Québec, du public ou du privé, nous étions à la hauteur de la société québécoise dont elle était si fière. Elle voulait qu’on se sente grand, qu’on ait confiance en nous et qu’on agisse en grand. Elle voulait nous préparer pour que ce passage d’adolescence au monde adulte nous soit plus facile.
Lise nous traitait comme des grands de ce monde, de Québec, du Québec. Elle nous a fait découvrir les Gilles Vigneault, Félix Leclerc, Nelligan, Claude Léveillée, la musique classique et Molière aussi, etc.
Lise était fière de nous, et elle nous le disait. Elle nous sortait malgré les ressources limitées de notre école. Elle nous amena au cœur de la ville pour découvrir les vieux quartiers et visitez le Parlement de Québec. Comme des grands, nous y avons croisé René Lévesque, accueilli par le député de Vanier du temps, Jean-François Bertrand. Comme par magie, tout devenait matériel pédagogique, plein de riches sources d’apprentissage et de pratiques à devenir de meilleurs grands.
Elle nous a permis de redonner aux plus démunis par une visite auprès de nos aînés à l’Hôpital général de Québec pour qui elle nous a fait chanter et réciter de la poésie dans le but de briser un peu de leur isolement, le temps d’un après-midi. Puis, au Jardin zoologique où ne faisant rien à moitié, elle nous a fait découvrir les animaux tant en hiver qu’en temps plus chaud. Même les Jeux olympiques de 1976 prenaient avec elle une couleur et une signification fort importante. Elle ne nous a pas emmenés loin, mais elle nous a fait voyager. Elle a proposé des lieux où nous pouvions apprendre et ressentir que nous, ses grands, pouvions faire la différence.
Ma sœur cadette et le benjamin de la famille ont aussi eu la chance d’avoir Lise Lemieux comme professeure. Ce n’était pas sans valeur, ça pouvait même être impressionnant ! Je suis convaincue qu’ils auraient une tout autre histoire à vous raconter, mais croyez-moi, leur vécu est probablement tout aussi constructif et valorisant, car même si elle était réputée pour être sévère et parfois intransigeante, ce n’était jamais sans le désir conscient ou inconscient de faire de nous des GRANDS de la basse-ville de Québec.
« Ce que je suis aujourd’hui a un peu de cette grande dame qui avait choisi l’enseignement comme vocation! »Profitez de ces passionnés de l’éducation : de ces sources pas si rares!
Jour après jour, du matin au soir, ces professeurs éduquent et partagent leur quotidien avec des groupes disparates et, trop souvent, avec à leur trousse des parents qui malheureusement ont la critique facile et souvent de la difficulté à reconnaître la mauvaise attitude de leurs enfants tout en ignorant leur propre faiblesse face à leur rôle de parents. Je souhaite à tous les enfants d’avoir la chance de croiser une de ces « sources rares » : ceux et celles qui ont la vocation dans nos écoles malgré la lourdeur d’un système scolaire pas toujours évident, des classes bien remplies et des groupes de plus d’une trentaine d’élèves dont une dizaine en difficulté d’apprentissage!
Bonne année scolaire 2014 à tous!
Le texte sur Lise Beaudet m’a beaucoup touchée. Lise était ma prof de 5e, en 1960. Je garde d’elle d’excellents souvenirs.
Moi aussi j’ai eu cette chance d’avoir Lise Beaudet Lemieux comme professeur en 6e année….quelle femme! je ne garde que de riches souvenirs d’elle. Tout ce qui a été mentionné dans cet hommage est la réalité…nous étions ses grands! Merci de l’avoir si bien décrite. Elle était professeur dans l’âme….Merci Lise Beaudet Lemieux!
Merci d’avoir pris le temps de le lire et de m’écrire. Oui, elle était un prof de vocation!